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 En lever de rideau des premiers Etats généraux de l’Europe, organisés par Notre Europe, la fondation créée par J. Delors dont il est le président fondateur, par le Mouvement-européen France et sur une idée d’Europanova, samedi 17 mars dernier, à Lille, le président J. Delors a livré à la presse quotidienne régionale quelques réflexions. J’en retiens volontairement une seule : « Je n’ai pas l’intention de me mêler de la campagne, mais je reste sur ma faim. Je suis déçu » (cf article paru dans La voix du Nord vendredi 14 mars 2007 page 34)…

Ce commentaire rejoint la préoccupation exprimée à plusieurs reprises sur ce blog dédié à l’Europe dans la campagne présidentielle.

 A ces premiers Etats généraux de l’Europe et sur fond de crise de croissance et de sens du projet européen, il s’agit d’une invitation à inventer l’Europe de demain, de renouer avec la vision des Pères fondateurs[1] qui fait cruellement défaut aux dirigeants européens actuels et aussi aux candidats à l’élection présidentielle en France, à l’exception peut-être de quelques uns comme JC Juncker, premier ministre luxembourgeois et la présidente de l’Union européenne jusqu’au 30 juin prochain, la chancelière A. Merkel.

 La journée était organisée autour de séances plénières sortent de communions avec l’esprit européen et de tables-rondes.

Les premiers Etats généraux de l’Europe ont été ouverts par Mlle Biasini, comédienne, que vous retrouverez prochainement, samedi 24 mars 2007, dans « Nous nous sommes tant haïs » sur France 3 à 20h50.

J. Delors s’est dit soulagé que le flambeau soit repris par les jeunes générations. Il est assuré qu’il y aura une relance…Il est revenu sur cette Europe, continent du doute. La construction européenne est un compromis entre l’idéal et la nécessité. Ainsi, l’Europe n’a pas pu rester à 6. Elle s’est ouverte aux nouvelles démocraties et aussi à ceux qui voulaient la rejoindre. Il y a toujours les 4 grandes libertés. Des succès comme le programme Erasmus dont il propose de multiplier les financements par 3. L’Europe, elle tourne malgré les errements.Concernant les modalités d’exercice de la citoyenneté, la Constitution était inadéquate, selon lui. A propos de l’élargissement/approfondissement, le processus de décision s’est affaibli. Il conviendrait d’en revenir à la différenciation ou aux coopérations renforcées. Enfin, un débat sur les finalités de l’Europe révéleraient des visions différentes de l’Europe pour les 20 ans à venir.

 J’ai pu participer à la table-ronde sur « le marché et la libre circulation : une évidence ? » J’ai envie de répondre pas tant que ça. Il y a été abondamment question de la concurrence. P. Herzog, président de Confrontations Europe, a introduit les travaux en se référant à Keynes et son ouvrage « Les conséquences économiques de la Paix » où il exhorte à développer la coopération économique. Il est revenu sur la volonté des pères fondateurs de l’Europe pour lesquels il ne s’agissait pas seulement de choix économiques mais de choix humanistes. En effet, un espace sans frontières, la multiplication des échanges sont autant de facteurs de prospérité. Le passage du marché commun au marché unique représentait pour, J. Delors, un saut qualitatif. En effet, le marché unique devait s’accompagner d’une union économique et monétaire et surtout d’une union politique. L’œuvre reste inachevée. Il reste l’harmonisation fiscale à réaliser, les services et biens publics pas seulement à défendre mais à promouvoir ainsi que la libre circulation des personnes. De tout cela, la France n’a pas vraiment discuté.

 B. Bollaert, ancien rédacteur en chef et chroniqueurdu Figaro, était chargé d’animer les débats. Il a posé les questions aux panélistes.

La 1ère question avait trait à la concurrence dans le marché unique, en référence au débat qui anima la campagne référendaire. Pour J. Barrot, commissaire européen, il semble que nous n’ayons pas tout compris du marché unique. La concurrence permet d’établir des standards afin de tester les produits au niveau européen avant le marché mondial. Des projets comme Airbus ou Galileo témoignent de la synergie entre les entreprises. Elle offre aussi une possibilité de négocier avec les autres puissances du monde. Mettre en concurrence signifie réhabiliter le droit qui protège le consommateur, les petits producteurs. La concurrence régulée c’est une protection du consommateur, la préservation des petits producteurs. Pour E. Farvaque, universitaire, il n’y a pas d’économie de marché sans concurrence, sans droit.

B. Bollaert est revenu sur la directive de libéralisation des services. Pour J. Barrot, le projet de directive Bolkestein s’était directement inspirée du modèle de la libre circulation des biens et des produits. Ce fut une erreur. De plus, pour P. Herzog, il s’est agit d’une ouverture du marché des services aux forceps. Pour  E. Farvaque, un produit n’est pas un service.

 Enfin, B. Bollaert a évoqué l’harmonisation fiscale et l’euro. Pour J. Barrot, l’harmonisation fiscale est un sujet laborieux. Il faut distinguer la TVA sur les produits qu’il convient de rapprocher de celle sur les services à la personne où là l’harmonisation ne s’impose pas. De plus, l’harmonisation porte sur les taux et aussi l’assiette. Quant à l’euro ; la zone euro comprend aujourd’hui 13 membres depuis l’entrée de la Slovénie. La Lituanie n’en est pas loin. Il est de bon ton de critiquer l’euro, la vie chère mais elle le serait plus encore sans l’euro. Le problème à résoudre est celui de la gouvernance économique et aussi de la gouvernance mondiale. En effet, les taux de certaines monnaies sont très basses bien en-dessous de leur valeur comme la monnaie chinoise.

Pour P. Herzog, il convient de ne pas séparer le social de l’économie. Il a souligné que le dialogue social européen n’est pas en forme, qu’un renouveau est attendu. Les restructurations ne doivent pas être abordées en aval, mais doivent être anticipées, préparées.

E. Farvaque est revenu sur le spectre du plombier polonais. La crainte générée par le plombier polonais est celle de la concurrence par les coûts notamment sociaux. Les nouveaux entrants des pays de l’Europe centrale et orientale ont un besoin de croître rapidement et pour ce faire ils recourent à leur seul avantage comparatif : les bas coûts de main d’œuvre. Si on veut y remédier, il s’agit d’augmenter les moyens des fonds structurels. Quant à l’euro : qu’est-ce qu’on veut ? Au début, l’euro était une monnaie faible par rapport au dollar. Ça n’allait pas. Puis, l’euro est devenu une monnaie forte, ça ne va toujours pas. En fait avec l’euro, nous avons voulu inverser l’adage américain selon lequel, « le dollar est notre monnaie et votre problème ». Il s’agit désormais de dire aux américains, « L’euro est notre monnaie et votre problème ». Il n’y a pas de problème de politique de taux de change. Les taux d’intérêt sont les plus bas. L’euro est un instrument de politique économique important.

 Le débat qui s’est engagé avec la salle a porté sur la préférence communautaire, les fonds de pension et la protection des salariés.

 J’ai aussi participé à celle consacrée à « une Union d’Etats et de peuples : vers un nouveau fédéralisme ? » et, fin à celle consacrée à « la solidarité par l’euro, une réalité ? ».

 La séance de clôture réunissait E. Guigou, députée, ancien ministre des affaires européennes, P. Lequiller président de la délégation pour l’Union européenne de l’Assemblée nationale, Jean-Louis Bourlanges député européen et Tommaso Padoa-Schioppa, ministre italien de l’économie et des finances, président de Notre Europe.

J’en retiens quelques uns des propos de J-L Bourlanges. Il a évoqué la crise d’identité que traverse l’Europe depuis l’effondrement de l’idéologie communiste caractérisée par la chute du mur en Allemagne, la fin de la guerre froide. Il est revenu sur le NON français, qui fait de la France un phare clignotant en Europe. Pour lui, 3 questions méritent d’être posées : Comment en sortir ? Que proposer ? Il reprend le protocole économique et social de J. Delors. Il conviendrait de dissocier dans un prochain traité les principes, le droit, les compétences, les institutions et les procédures du contenu des politiques. Enfin, comment décider et qui ? Le peuple français a dénoué le lien qui le rattacher à l’Europe, lui seul peut le renouer. Tous ont bien compris qu’il n’existe pas de plan B…

Tommaso Padoa Schioppa qui cloturait la journée. Seule, la vérité permettra de sortir de la crise européenne. Les masques doivent tomber pour dire ce que nous voulons faire ensemble…

 Alors que se préparait ces premiers Etats généraux de l’Europe, le journal Le Figaro rendait compte d’un sondage, non pas sur le vote pour l’élection présidentielle, où l’on apprend que les Français sont fiers d’être européens à 71% et fiers d’être Français quasi dans la même proportion 73%. En effet, l’Europe est vécu par les Français comme une forme de prolongement de la France. Ceci n’est sans doute pas contradictoire avec le vote sur le référendum du 29 mai 2005. Selon Jacques Delors, on peut être fier d’être Européen et ne pas partager la vue de ce qui était proposé. Toujours dans le même sondage, dans le classement effectué par les sondés sur les personnalités françaises ayant le plus contribué à la construction européenne : Charles De Gaulle y arrive en tête avec 32% contre 11% et 10% respectivement pour J. Monnet et R. Schuman. En rapprochant ce classement de la fierté d’être Français et Européen, le résultat ne surprend pas. C. De Gaulle reste dans l’imaginaire des Français celui qui leur redonna la fierté d’être Français, après les heures sombres de la France de Vichy.

 

 

 

 



[1] A ce propos, je vous invite à ne pas rater la diffusion de « Nous nous sommes tant haïs » sur France 3 samedi 24 mars à 20h50 ou comment la réconciliation franco-allemande sur fond de charbon et d’acier de la CECA est mise en image et interprétée par des acteurs remarquables dont B-P Donnadieu dans le rôle de J. Monnet A voir absolument en famille et entre générations.

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